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Back to Dreamlands

 

 

Andreas Gursky World III

Photo d’Andreas Gursky

  

On se prend à rêver sur ce qu’aurait pu donner « Dreamlands » si les commissaires de l’exposition (présentée au centre Georges-Pompidou et qui s’est achevée début août) avaient un tant soit peu travaillé. Non pas en se contentant de dresser la liste des œuvres à exposer, ce qui prend tout au plus un après-midi ou une soirée autour d’une bonne bouteille (et ne dites pas le contraire, j’ai fait l’expérience), mais en réfléchissant à ce qui relie des éléments aussi épars que contradictoires, en les confrontant, en essayant d’en tirer une réflexion pas tant architecturale et urbanistique que politique.
 

Seulement voilà, le mot est lâché : pas de politique au centre Georges-Pompidou. Et quant à adapter un livre de Rem Koolhaas, puisque c’est le sens de cette exposition, on préfèrera New York délire (chef-d’œuvre de 1978, traduction française chez Parenthèses en 2002) plutôt que le bouillonnant, foutraque et très subversif Harvard Design School Guide To Shopping (Taschen, 2001). Du milieu des années soixante-dix à 2000, le regard de Rem Koolhaas s’est bien évidemment affiné, il a gagné en profondeur critique ; les deux ouvrages n’ont, de ce point de vue, strictement rien à voir. C’est pourtant le plus innocent que l’on va privilégier ici.

Architecture utopique, cités idéales, urbanisme marchand, centres commerciaux, décors, expositions universelles, fêtes foraines, parcs d’attractions, circulation, économie, rêves : tout ceci est un peu présent, par touches, par allusions. Débrouillez-vous avec Robert Venturi, là avec les surréalistes, ici avec Disney. Dubaï est évidemment là, mais qui n’en parle pas ? Même la pire télévision commerciale consacre à la ville des reportages critiques, c’est dire. Ce qui est très prétentieux, c’est de laisser entendre que l’on détient la clé de la lecture de l’ensemble, alors que ces gens-là ne fournissent pas l’ombre d’une explication pour éclairer leurs choix. Pour tout dire, je les soupçonne d’être payés à ne rien foutre – ce que je ne condamne pas en soi, mais alors il ne faut pas faire payer 12 euros l’entrée !

 

EPCOT 1

 

Experimental Prototype Community of Tomorrow

EPCOT

 

En ce qui me concerne, l’unique découverte fournie par ce parcours pour le moins laconique a été celle d’EPCOT, une ville qui devait prendre place dans le vaste Disney World en Floride. Le projet initial est très différent du parc d’attractions qui l’a finalement remplacé (Epcot Center). Peter Blake en a résumé les grandes lignes : « EPCOT, in short, will be a huge laboratory for the testing of cities of the future, a functioning community inhabited by perhaps 20,000 people, operating in the tomorrow today. »

Donc, nos braves commissaires ont été dénicher sur YouTube ce film institutionnel d’une vingtaine de minutes, réalisé vers 1966-67, une présentation d’EPCOT par Walt Disney lui-même. C’est à voir ici et c’est en trois parties.

 

EPCOT

 

Je recommande vivement la lecture de « The Lessons of the Parks » de Peter Blake, qui constitue le dernier chapitre du monumental The Art of Walt Disney de Christopher Finch (New York, Harry N. Abrams, Inc., 1973). Il s’agit de l’étude des éléments architecturaux de Walt Disney World (WDW) et d’une présentation des constructions du lac Buena Vista et d’EPCOT, espaces encore à l’état de projet au moment de la rédaction. Blake relate par le menu les avancées technologiques du WDW, soulignant l’utilisation d’éléments préfabriqués qui constituent l’hôtel contemporain, la multiplicité des transports en commun (du monorail au sous-marin) et des niveaux de circulation, l’importance donnée au piéton. Il insiste longuement sur la dimension écologique de l’ensemble, une préoccupation qui laissait à peu près tout le monde indifférent au moment de sa conception, dans les années soixante. L’enthousiasme qui donne le ton à cet article témoigne de la conscience qu’a Blake de sa valeur : il est le premier à avoir saisi l’originalité de WDW. Le fait que son article soit d’abord paru dans la revue The Architecture Forum en dit long. Il ne faut pas hésiter à inscrire ce projet de ville dans une tradition qui remonterait aux salines royales d’Arc-et-Senans de Claude-Nicolas Ledoux jusqu’à la Broadacre City de Frank Lloyd Wright en passant par la Cité industrielle de Tony Garnier.

 

epcot 3

 

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