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23 août 2009 7 23 /08 /août /2009 09:53

Concernant la restauration de l’hôtel Lambert, l’audience du 21 août au tribunal administratif a essentiellement révélé le projet des Monuments historiques ; celui-ci ne vise rien de moins qu’à un retour à l’architecture originelle du XVIIe siècle et la destruction des modifications que les trois siècles suivants ont ajoutées. Ce projet se trouve en opposition avec l’esprit de la « Charte de Venise » qui préconise au contraire le maintien des apports successifs. Cette charte n’ayant aucune valeur juridique, comme s’est plu à le rappeler la représentante des Monuments historiques, il est à craindre que l’hôtel Lambert subisse des dégradations irréversibles.  


Le IIe Congrès International des Architectes et des Techniciens des Monuments Historiques, réuni, à Venise du 25 au 31 mai 1964, a approuvé le texte suivant :


Charte internationale sur la conservation
et la restauration des monuments et des sites


DÉFINITIONS

Article 1.

La notion de monument historique comprend la création architecturale isolée aussi bien que le site urbain ou rural qui porte témoignage d’une civilisation particulière, d’une évolution significative ou d’un événement historique. Elle s’étend non seulement aux grandes créations mais aussi aux œuvres modestes qui ont acquis avec le temps une signification culturelle.

Article 2.

La conservation et la restauration des monuments constituent une discipline qui fait appel à toutes les sciences et à toutes les techniques qui peuvent contribuer à l’étude et à la sauvegarde du patrimoine monumental.

Article 3.

La conservation et la restauration des monuments visent à sauvegarder tout autant l’œuvre d’art que le témoin d’histoire.


CONSERVATION

Article 4.

La conservation des monuments impose d’abord la permanence de leur entretien.

Article 5.

La conservation des monuments est toujours favorisée par l’affectation de ceux-ci à une fonction utile à la société ; une telle affectation est donc souhaitable mais elle ne peut altérer l’ordonnance ou le décor des édifices. C’est dans ces limites qu’il faut concevoir et que l’on peut autoriser les aménagements exigés par l’évolution des usages et des coutumes.

Article 6.

La conservation d’un monument implique celle d’un cadre à son échelle. Lorsque le cadre traditionnel subsiste, celui-ci sera conservé, et toute construction nouvelle, toute destruction et tout aménagement qui pourrait altérer les rapports de volumes et de couleurs seront proscrits.

Article 7.

Le monument est inséparable de l’histoire dont il est le témoin et du milieu où il se situe. En conséquence le déplacement de tout ou partie d’un monument ne peut être toléré que lorsque la sauvegarde du monument l’exige ou que des raisons d’un grand intérêt national ou international le justifient.

Article 8.

Les éléments de sculpture, de peinture ou de décoration qui font partie intégrante du monument ne peuvent en être séparés que lorsque cette mesure est la seule susceptible d’assurer leur conservation.


RESTAURATION

Article 9.

La restauration est une opération qui doit garder un caractère exceptionnel. Elle a pour but de conserver et de révéler les valeurs esthétiques et historiques du monument et se fonde sur le respect de la substance ancienne et de documents authentiques. Elle s’arrête là où commence l’hypothèse, sur le plan des reconstitutions conjecturales, tout travail de complément reconnu indispensable pour raisons esthétiques ou techniques relève de la composition architecturale et portera la marque de notre temps. La restauration sera toujours précédée et accompagnée d’une étude archéologique et historique du monument.

Article 10.

Lorsque les techniques traditionnelles se révèlent inadéquates, la consolidation d’un monument peut être assurée en faisant appel à toutes les techniques modernes de conservation et de construction dont l’efficacité aura été démontrée par des données scientifiques et garantie par l’expérience.

Article 11.

Les apports valables de toutes les époques à l’édification d’un monument doivent être respectés, l’unité de style n’étant pas un but à atteindre au cours d’une restauration. Lorsqu’un édifice comporte plusieurs états superposés, le dégagement d’un état sous-jacent ne se justifie qu’exceptionnellement et à condition que les éléments enlevés ne présentent que peu d’intérêt, que la composition mise au jour constitue un témoignage de haute valeur historique, archéologique ou esthétique, et que son état de conservation soit jugé suffisant. Le jugement sur la valeur des éléments en question et la décision sur les éliminations à opérer ne peuvent dépendre du seul auteur du projet.

Article 12.

Les éléments destinés à remplacer les parties manquantes doivent s’intégrer harmonieusement à l’ensemble, tout en se distinguant des parties originales, afin que la restauration ne falsifie pas le document d’art et d’histoire.

Article 13.

Les adjonctions ne peuvent être tolérées que pour autant qu’elles respectent toutes les parties intéressantes de l’édifice, son cadre traditionnel, l’équilibre de sa composition et ses relations avec le milieu environnant.


SITES MONUMENTAUX

Article 14.

Les sites monumentaux doivent faire l’objet de soins spéciaux afin de sauvegarder leur intégrité et d’assurer leur assainissement, leur aménagement et leur mise en valeur. Les travaux de conservation et de restauration qui y sont exécutés doivent s’inspirer des principes énoncés aux articles précédents.


FOUILLES

Article 15.

Les travaux de fouilles doivent s’exécuter conformément à des normes scientifiques et à la « Recommandation définissant les principes internationaux à appliquer en matière de fouilles archéologiques » adoptée par l’UNESCO en 1956.

L’aménagement des ruines et les mesures nécessaires à la conservation et à la protection permanente des éléments architecturaux et des objets découverts seront assurés. En outre, toutes initiatives seront prises en vue de faciliter la compréhension du monument mis au jour sans jamais en dénaturer la signification.

Tout travail de reconstruction devra cependant être exclu à priori, seule l’anastylose peut être envisagée, c’est-à-dire la recomposition des parties existantes mais démembrées. Les éléments d’intégration seront toujours reconnaissables et représenteront le minimum nécessaire pour assurer les conditions de conservation du monument et rétablir la continuité de ses formes.


DOCUMENTATION ET PUBLICATION

Article 16.

Les travaux de conservation, de restauration et de fouilles seront toujours accompagnés de la constitution d’une documentation précise sous forme de rapports analytiques et critiques illustrés de dessins et de photographies. Toutes les phases de travaux de dégagement, de consolidation, de recomposition et d’intégration, ainsi que les éléments techniques et formels identifiés au cours des travaux y seront consignés. Cette documentation sera déposée dans les archives d’un organisme public et mise à la disposition des chercheurs ; sa publication est recommandée.


Ont participé à la commission pour la rédaction de la charte internationale pour la conservation et la restauration des monuments :

M. Piero Gazzola (Italie), président ; M. Rymond Lemaire (Belgique), Rapporteur ; M. José Bassegoda-Nonell (Espagne) ; M. Luis Benavente (Portugal) ; M. Djurdje Boskovic (Yougoslavie) ; M. Hiroshi Daifuku (U.N.E.S.C.O.) ; M. P.L. de Vrieze (Pays-Bas) ; M. Harald Langberg (Danemark) ; M. Mario Matteucci (Italie) ; M. Jean Merlet (France) ; M. Carlos Flores Marini (Mexique) ; M. Roberto Pane (Italie) ; M. S.C.J. Pavel (Tchékoslovaquie) ; M. Paul Philippot (Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels) ; M. Victor Pimentel (Pérou) ; M. Deoclecio Redig de Campos (Vatican) ; M. Jean Sonnier (France) ; M. François Sorlin (France) ; M. Eustathios Stikas (Grèce) ; Mrs. Gertrud Tripp (Austriche) ; M. Jan Zachwatovicz (Pologne) ; M. Mustafa S. Zbiss (Tunisie).


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21 août 2009 5 21 /08 /août /2009 01:34




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20 août 2009 4 20 /08 /août /2009 15:09

Sauvergarde et mise en valeur du Paris historique


Paris, le 18 août 2009

Madame, Monsieur,
Chers adhérents et défenseurs du patrimoine,

Trois recours ont été déposés par Paris Historique en date du 10 août dernier, à moins de deux mois de la décision ministérielle du 11 juin 2009 avalisant la restauration très contestée de l’hôtel Lambert, c’est-à-dire à l’intérieur des délais prévus par la loi. Selon des modalités mises au point par le cabinet Huet & associés qui nous assiste, le recours gracieux auprès du Ministère de la Culture s’accompagne d’un recours en suspension et d’un recours en annulation.

La réaction du Tribunal administratif ne s’est pas fait attendre : nous avons appris à la veille du week-end passé que l’audience était fixée par le juge des référés au

vendredi 21 août, à 11 h 30
au Tribunal Administratif,
7, rue de Jouy, Paris 4e arrt.

La séance est publique et il est très souhaitable que toute personne préoccupée par ce projet assiste à cette étape décisive de la procédure. En plein mois d’août un peu d’affluence ne pourrait qu’asseoir l’importance du cas qu’il s’agit de trancher. Plusieurs personnalités et journalistes ont déjà fait savoir qu’il seraient présents.

Comptant sur votre engagement, nous vous prions de croire, Madame, Monsieur, chers adhérents et défenseurs du patrimoine, à notre plus profond dévouement à la cause de l’hôtel Lambert.

Pierre Housieaux
Président



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7 août 2009 5 07 /08 /août /2009 13:19

Protestation en musique et récolte de signatures pour une pétition en vue de faire annuler la destruction d’un modeste escalier au cœur du Ve arrondissement, à l’angle des rues Saint-Victor et Poissy, près de la rue des Écoles.



Cette sympathique réunion, qui a été suivie d’un rendez-vous à la mairie en début de semaine, a permis d’obtenir la suspension des travaux jusqu’en septembre. À suivre, donc.


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7 août 2009 5 07 /08 /août /2009 12:45

Vaison-la-Romaine













Orange.


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3 août 2009 1 03 /08 /août /2009 21:54

À chaque fois que je passe devant, je ne peux m’empêcher de m’arrêter pour l’observer. Et d’abord, il tient comment ?



Au 36 de la rue de la Verrerie (magasin BHV), dans le IVe arrondissement de Paris.


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31 juillet 2009 5 31 /07 /juillet /2009 16:35







Théâtre antique.


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31 juillet 2009 5 31 /07 /juillet /2009 16:07



Viaduc de Millau





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4 juillet 2009 6 04 /07 /juillet /2009 02:41


Scandale de l’hôtel Lambert : Michèle Morgan prend la parole

Par Jean-François Cabestan

23 juin 2009

Michèle Morgan a résidé à l’hôtel Lambert pendant une vingtaine d’années. L’appartement qu’elle a abandonné en 1976 occupait l’étage-attique, au-dessus de la célèbre galerie d’Hercule, et se terminait par le balcon en demi-lune qui domine la Seine. Inquiète des travaux qu’on s’apprête à y entreprendre, l’actrice de Quai des brumes a très exceptionnellement accordé le privilège d’une interview exclusive à Jean-François Cabestan, historien, architecte du patrimoine et membre-expert de la Commission du Vieux-Paris. La partenaire de Jean Gabin et de Marcello Mastroianni évoque ici maints souvenirs de ce lieu magique et lumineux où elle a beaucoup peint et dont elle connaît l’épaisseur historique. Notamment préoccupée par le bouleversement des fondations, Michèle Morgan a souhaité que son nom soit ajouté à la liste des pétitionnaires.  

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre séjour à l’hôtel Lambert ?

J’ai habité l’hôtel Lambert pendant presque une vingtaine d’années, jusqu’en 1976 et je suis partie parce que les Rothschild, avec lesquels j’ai vécu un temps ont racheté. J’habitais tout en haut de l’hôtel : je donnais sur la Seine et sur le jardin. Le pont Henri-IV était sous mes fenêtres, mais au quatrième étage ce n’était pas bruyant. Vous savez, les voitures passaient de l’autre côté de la Seine. À l’époque, Paris, c’était quand même plus calme. L’île Saint-Louis n’était pas ce qu’elle est devenue maintenant avec toutes les voitures, les restaurants et tout ça… C’était très calme. Les Pompidou habitaient de l’autre côté. On montait par un petit escalier sur le côté – il n’y avait pas d’ascenseur à cette époque – très élégant moitié bois, moitié tomette, c’était très chic, avec une rambarde en bois, pour autant que je me souvienne. Mon appartement faisait partie de tout l’étage qui était au-dessus de la galerie d’Hercule. On entrait, il y avait un long couloir qui menait à une grande pièce. J’étais, à cette époque-là, mariée avec un acteur qui s’appelait Henri Vidal, un célèbre jeune premier de l’époque. Mais enfin, il avait sa chambre et moi, la mienne qui donnait sur la Seine. Une petite chambre ravissante. Il y avait aussi une salle à manger, avec ces fenêtres de l’époque, qui étaient très belles. D’ailleurs, j’ai fait le portrait de mon fils devant une de ces fenêtres. Je n’ai jamais manqué de soleil. Je crois que j’avais le meilleur appartement de l’hôtel… c’était délicieux. Les Rothschild ont été charmants – je leur dois un souvenir agréable – parce que, très élégamment, ils m’ont dédommagée, ce qui m’a permis d’acheter cet appartement à Neuilly. Je suis une fille de Neuilly-sur-Seine, j’y suis née et j’y ai vécu toute mon enfance. Donc je n’avais qu’un rêve au monde – en dehors de l’hôtel Lambert, qui a été une merveille –, celui de retourner habiter à Neuilly.  

Qui habitait l’hôtel Lambert de votre temps ?

Il y avait les Czartoryski, une vieille famille polonaise. C’étaient des gens un peu hautains et désargentés qui ne devaient pas être tellement contents d’avoir une théâtreuse ou une vedette de cinéma dans leur sublime hôtel de l’île Saint-Louis. Peut-être la première génération des Czartoryski était-elle moins snob. Pour compenser l’argent il y a le snobisme, quand même, n’est-ce pas ? Il y avait aussi Redé, le baron de Redé, qui passait de mon côté parce qu’il habitait en dessous de chez moi. Il a toujours été très charmant et très urbain. Il y avait enfin un autre monsieur très riche qui habitait là, un étranger, un homme d’Amérique du Sud (Arturo Lopez-Willshaw, le protecteur du baron de Redé, ndlr) et qui était charmant d’ailleurs. On était peut-être trois ou quatre locataires, il y a eu à un moment une femme très connue, qui était très amie avec le baron de Redé (Marie-Hélène de Rothschild, ndlr). C’est par Redé que les Rothschild sont arrivés et il est resté avec eux. Le baron de Redé était très ami avec tous ces gens-là. Moi, j’étais la comédienne et j’habitais tout en haut. Alors, c’est drôle parce que les bateaux passaient sous les fenêtres de ma chambre et j’entendais le soir les commentaires : « … et là habite Madame Michèle Morgan ! » Ils ne parlaient pas du baron de Redé, des Rothschild et de rien du tout. Alors les gens devaient s’imaginer que cet hôtel sublime et mirifique m’appartenait, alors que je n’étais que locataire. C’était une grande maison et on se rencontrait très rarement. On se trouvait complètement par hasard en partant ou en rentrant dans la cour. Je n’ai jamais vu vraiment passer personne par le grand escalier, qui servait sans doute du temps de la splendeur de l’hôtel Lambert ou dans les grandes occasions. L’hôtel était très habité quand même. Il y avait un gardien à l’accent alsacien, ou quelque chose comme ça, peut-être. Il était assez rogue, mais quand même très bien comme gardien, et finalement, c’était un homme très gentil.

Que pensez-vous de l’installation du nouveau propriétaire et de sa famille à l’hôtel Lambert ?

Ils sont habitués à des espaces immenses chez eux, mais quand ils achète un hôtel dans l’île Saint-Louis, ils ne se rendent pas compte tout d’un coup que là, ils sont à Paris, et surtout dans l’île Saint-Louis. Quelle idée d’acheter ce truc dans l’île Saint-Louis ; ça, c’est d’un snobisme ! Ils auraient dû construire autour de Paris, ils auraient eu toute la place qu’ils voulaient. Mais ça faisait moins chic, peut-être, c’était moins élégant ! Cette île Saint-Louis c’est extraordinaire ; l’hôtel Lambert, c’est la cerise sur le gâteau. Mais pourquoi est-ce que la Ville de Paris n’a pas racheté cet endroit pour en faire un musée, ne serait-ce que pour la galerie d’Hercule ?

On s’inquiète aujourd’hui des risques d’inondation dans la galerie d’Hercule. Qu’en était-il de votre temps ?


J’avais le balcon rond qui dominait la Seine et le pont Henri-IV. Au début, j’ai essayé de le fleurir, mais comme il y avait la galerie d’Hercule, on m’a demandé de ne pas arroser, évidemment ; parce qu’ils avaient peur pour la galerie, ce que j’ai très bien compris et j’ai dû enlever toutes les plantes, les fleurs, etc. Vous vous rendez compte, les plafonds peints, par je ne sais plus qui d’ailleurs… ah oui ! Le Brun : je les comprends. D’ailleurs je n’ai fait ni une ni deux, j’ai retiré toutes les plantes qu’il y avait, on a tout enlevé et voilà… J’avais aussi une petite cuisine, enfin une cuisine normale, et puis deux salles de bains ; mais cuisine et salle de bains ne correspondaient pas à la galerie d’Hercule. Ce n’était pas au-dessus de la galerie, c’était sur le côté, plus vers l’intérieur de l’île.

Aviez-vous une voiture ? Comment la gariez-vous ?

Oui, j’avais une voiture, mais je la garais ailleurs de l’autre côté du pont, ce qui n’était pas très pratique, je dois dire, d’ailleurs, dans un grand garage, boulevard Morland. Je jouais au théâtre à cette époque et le soir à minuit, quand je rentrais, mes amis me disaient : « Mais comment, tu habites l’île Saint-Louis et tu rentres toute seule après le théâtre » ? Je n’ai jamais eu peur, d’ailleurs je n’ai jamais eu peur de grand-chose, surtout à cette époque-là. Et puis, le théâtre finissait vers onze heures, onze heures et demie, et à minuit j’étais chez moi, bien sûr. Mes amis s’inquiétaient parce que je devais traverser le pont Henri-IV. Je n’ai jamais eu la possibilité d’entrer dans la cour de l’hôtel en voiture, jamais. La porte cochère était toujours fermée. On avait la clef ou on sonnait, et ça s’ouvrait.  

Avez-vous entendu parler de ce projet de parking souterrain qui préoccupe beaucoup les spécialistes ?


Je sais qu’ils veulent faire des garages et des parkings. Évidemment, je comprends que les nouveaux propriétaires aient envie d’avoir un garage sous leur maison, car où vont-ils se parquer dans l’île Saint-Louis ? C’est plein tout le temps ! Mais pourquoi veulent-ils faire un immense parking comme ça ? Pourvu que le parking n’ébranle pas le bâtiment. Mais moi, ça me désole quand même un peu d’entendre ça, parce que j’ai très peur pour les sous-sols. Ils seront bien avancés quand toutes leurs voitures seront complètement inondées. C’est imprévisible, bien sûr, mais l’eau envahit tout ; on oublie toujours ça. Mais ça va être un bordel terrible – excusez-moi – d’avoir ce parking dans cette petite rue Saint-Louis-en-l’Île. Il faut qu’ils réduisent, il faut faire moitié-moitié, il faut discuter le coup, il ne faut pas aller trop près de la Seine. Il faut avoir une discussion et leur dire : écoutez, ou alors c’est l’interdiction totale ou alors vous réduisez… Ils n’ont qu’à revendre, hein ? C’est la meilleure solution ! S’ils ont l’intention d’avoir beaucoup de monde, on peut aussi leur dire de se garer dans la cour intérieure. Elle est immense cette cour.  

On envisage de creuser sous le jardin. Qu’en pensez-vous ?

Creuser sous le jardin ? Oh la la, mais c’est dangereux, ça… J’espère bien que le sous-sol ne sera pas abîmé… c’est un terrain assez mouillé, quand même. Ils en sont bien conscients, de ça ? Mais comme vous savez maintenant, on consolide beaucoup les choses… Qu’est-ce qu’ils peuvent faire ? Que pensent les architectes de ça ? Vous vous rendez compte, si la Seine rentre dans tout ça, par le sol ? La force de l’eau, c’est plus fort que tout, on a beau mettre des barrières, du ciment ; parce qu’ils prennent des risques quand même, ils prennent le risque que le « château » s’effondre, avec la galerie d’Hercule dedans… Si ça leur tombe sur le nez, il sera trop tard.  

Vous êtes une célébrité. Accepteriez-vous d’appuyer la pétition en faveur d’une réorientation du projet de restauration de l’hôtel Lambert ?

Je ne sais pas comment il se fait que les gens se souviennent encore de moi. C’est étonnant qu’on regarde encore Quai des brumes ! Qu’est-ce que je peux faire, moi ? C’est de la faute de la Ville de Paris. Ils n’auraient jamais dû laisser partir ça. Je veux bien signer la pétition, bien sûr, mais pas toute seule quand même : ils vont me trucider. Mais vous savez, contre l’argent, vous aurez beaucoup de mal. Avec l’argent on peut tout acheter, hein, et toutes les pétitions au monde ne peuvent rien. Enfin, on peut toujours essayer de se battre… Je signe.

http://www.prestigium.com/fr/news/culture/michele-morgan-evoque-ses-annees-a-l-hotel-lambert-et-ses-craintes-sur-la-restauration-du-batiment-591/



Ci-dessus : Les Orgueilleux (Yves Allégret, 1953).


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20 juin 2009 6 20 /06 /juin /2009 20:28

Jean-François Cabestan :
« Ce projet mutile et dénature l’Hôtel Lambert »


Par Céline Rouzet, L’Express.fr du 19 mai 2009



Jean-François Cabestan, historien de l’architecture et enseignant à l’Université Paris I, réagit à l’autorisation donnée par le ministère de la Culture pour les travaux de restauration de l’Hôtel Lambert, un hôtel particulier classé Monument historique racheté en 2007 par la famille de l’émir du Qatar.

Que pensez-vous du feu vert donné par le ministère de la Culture pour lancer les travaux de rénovation de l’Hôtel Lambert ?

Ce feu vert n’est que l’un des rebondissements d’un conflit qui a démarré le 18 décembre 2008, date à laquelle la Commission du Vieux-Paris a été instruite du projet de reconversion de l’Hôtel Lambert en une résidence de goût international.

Quels étaient les travaux prévus au départ ? Pour quel budget ?

Les auteurs du projet ont tenté de faire de la vétusté de l’édifice et de la restauration très souhaitable d’une partie de ses décors l’alibi d’actions incompatibles avec sa valeur patrimoniale. Comment admettre que l’excavation de l’intégralité de la cour d’honneur, d’une partie conséquente du jardin, la création de trois ascenseurs ex-nihilo, la redistribution des étages et le conditionnement de l’air puissent contribuer à la mise en valeur de l’hôtel du XVIIe siècle ?

Quels sont les travaux qui demeurent dans le projet ?

Si l’un des ascenseurs épargne désormais un plafond peint, historié et doré, l’essentiel des actions les plus mutilantes demeure d’actualité. L’exhaussement du mur de soutènement du jardin suspendu, la réfection de toutes les façades, la modifications de nombreuses lucarnes et l’ajout d’éléments décoratifs tels que pots-à-feu et épis de faîtage ajouteront encore à la perte d’authenticité de l’édifice. Il en coûtera au propriétaire le double voire le triple du chiffrage de 13 millions plusieurs fois avancé par la presse.

Comment peut-on expliquer que la rénovation de l’Hôtel Lambert ait créé une telle polémique ?

Huit mille personnes dont d’importantes figures du monde de l’architecture, des arts, des sciences et des lettres ont signé la  pétition lancée par l’association « Paris Historique » en faveur de l’Hôtel Lambert. Ce mouvement d’opinion inédit pour un bâtiment classé et en principe protégé par l’État est une première. Il témoigne d’une défiance du public vis-à-vis des positions du ministère de la Culture.

Restauration, rénovation, modernisation ou défiguration ?

L’existence d’un propriétaire désireux de procéder à la restauration exemplaire d’une construction qu’il destine à son usage personnel était une aubaine. Or, dans son état actuel, le projet mutile et dénature l’hôtel. Il est incompréhensible que des garants de la préservation et de la transmission du patrimoine – l’architecte en  chef (ndlr : Alain-Charles Perrot) et le ministère – n’aient pas usé de leur crédit pour arbitrer l’opération en fonction des réels enjeux patrimoniaux qu’elle soulève.


http://www.lexpress.fr/culture/architecture-patrimoine/patrimoine/jean-francois-cabestan-ce-projet-mutile-et-denature-l-hotel-lambert_768650.html



Le Parisien, 17 juin 2009


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